Avis d’expert : peut-on développer une addiction au fromage ?

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Repris partout dans les médias, le fromage serait aussi addictif que la drogue : idée reçue ?


Une étude américaine a révélé dans le National Library of Medicine que le fromage rendrait « accro ». Une addiction semblable à celle que l’on pourrait développer pour le tabac, l’alcool ou même la drogue. Info ou intox, Docteur Juliette Hazart, médecin addictologue et conférencière nous répond. En même temps, qui résisterait à un délicieux toast de tomme et confiture de figues, une fondue savoyarde ou un peu de parmesan sur un plat de spaghettis ? En entrée, plat voire dessert, ce produit laitier trouve toujours sa place dans l’assiette.

La caséine, vraie responsable de l’addiction au fromage ? 

Selon l’étude américaine, la principale responsable de cette addiction au fromage serait la caséine, une protéine animale. À en croire l’étude, elle agirait sur notre corps, et plus particulièrement, notre dopamine, l’hormone du plaisir, en donnant une envie soudaine d’en consommer sans s’arrêter. Pourtant, Docteur Juliette Hazart nous informe : « à l’heure actuelle, il n’existe pas de consensus scientifique à ce sujet. Cette dépendance à la caséine reste une hypothèse scientifiquement non prouvée. » 

Un mécanisme d’addiction commun pour une finalité différente

Face aux explications de notre experte, quel élément a pu amener l’étude américaine à qualifier d’ « addiction » notre amour pour le fromage ? « Il est important de rester vigilant sur le fait d’associer le mot “addiction“ aux aliments. » Pour tout comprendre, distinguons l'addiction à un comportement alimentaire de l’addiction à une substance. 

« Lorsque l’on consomme un aliment, comme le sucre, on active les mêmes régions du cerveau que lorsque l’on consomme de l'alcool ou de l’héroïne. On appelle cette zone le  circuit de la récompense. Cependant, dans le cadre de la consommation de nourriture ou d’un rapport sexuel, ce circuit s’active naturellement, libérant une dopamine dite “contrôlée“, dans le but d’obtenir du plaisir et de répéter le comportement afin d’assurer sa survie et celle de l’espèce. Ce qui est tout à fait différent des drogues, comme l’héroïne, qui détournent le circuit de la récompense et augmentent artificiellement la sécrétion de dopamine, jusqu’à parfois la perte de contrôle et l’addiction.»

Finalement, tout se joue dans le comportement et ses conséquences sur la personne. « Une personne qui a une addiction au sens médical du terme aura des conséquences négatives dans sa vie personnelle, professionnelle ou sociale. »

L’addiction au fromage, mythe ou réalité ? 

Notre experte est formelle : « le fromage qui serait aussi addictif que la drogue est une idée reçue ! » On ne peut pas parler d'addiction au fromage si on emploie le terme « d’addiction » au sens de la maladie. « Dans le langage courant, on a tendance à dire que l’on est addict dès que l’on apprécie particulièrement quelque chose. Consommer du fromage tous les jours ne signifie pas qu’il y a une addiction. »

Pour cause, « l’addiction alimentaire (et non pas les troubles des conduites alimentaires comme la boulimie ou l' hyperphagie boulimique) n'est pas classifiée comme une pathologie dans le Manuel DSM 5 (5e manuel de diagnostic et de classification des troubles mentaux), à la différence des addictions à des substances comme l'alcool, le tabac, le cannabis, l’héroïne ou la cocaïne, qui le sont. » 

« La fréquence de consommation ou la quantité consommée ne sont pas des critères permettant de parler d’addiction. » 

Ce n’est ni la quantité ni la fréquence d'une consommation qui définissent une pathologie ou une addiction, tout est dans la perte de contrôle. « Il est important de distinguer l’addiction qui se caractérise par une perte de contrôle, de la gourmandise pour laquelle les envies sont contrôlables. »

« En cas de consommation alimentaire pour soulager un mal-être, si vous éprouvez le désir de vous abstenir ou de limiter votre consommation mais êtes dans l'incapacité d'y parvenir sans aide, si votre consommation est répétée dans le temps avec une envie forte et irrépressible, il est recommandé de consulter un thérapeute ».

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